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Les Idées Éparpillées
2 août 2016

"L'esquive"

Le 9 octobre 2013 sortait le film, très controversé, La vie d’Adèle. J’avais découvert l’œuvre de départ (Le Bleu est une couleur chaude, bouleversant roman graphique de Julie Maroh) environ un an auparavant et en étais tombée instantanément amoureuse. Je voyais d’un très mauvais œil l’arrivée de cette adaptation cinématographique libre, dont les premières images ne m’avaient rien laissé présager de bon. Finalement, le pari a été pour moi réussi et j’apprécie tout autant le film que la BD, pour des aspects différents.

Seul bémol à mon goût : ces interminables scènes de sexe érotisées (voire pornographiées) à l’extrême, créées de toutes pièces par et pour un imaginaire fantasmagorique masculin. Un décorticage de simulation orgasmique quelque peu surjoué.

J’ai toutefois décidé de ne pas rester bloquée sur cette fausse note. Nous sommes le 27 janvier 2016 et je me suis dit que j’allais visionner un autre film d’Abdellatif Kechiche pour voir un peu ce que ça donnait. Des divers conseils que l’on a pu me donner sur ce réalisateur, mon choix s’est porté sur L’esquive.

Pas déçue au départ : le jeu des acteurs est très prometteur, ce qui est assez impressionnant pour leur jeune âge. Le titre retranscrit bien le noyau de l’intrigue. La mise en abyme avec la pièce de théâtre est bien menée. Contexte de banlieue parisienne, Seine Saint-Denis. J’aurais tendance à dire que la représentation est assez réaliste, mais je ne prétends pas connaître assez cette réalité-là pour l’affirmer à 100%.

Et soudain… Gros malaise.

Le personnage de Frida qui doit avoir 13 ans, se fait agresser par Fathi, un peu plus âgé. La violence, d’abord verbale, se mue progressivement en violence physique. Puis une gifle part. « Juste une petite gifle » du bout des doigts.

Je sais pas si c’est juste moi, mais une grosse boule est venue se nicher dans mon ventre. Et pas n’importe laquelle : une boule de réflexe de peur. C’était pas une émotion déclenchée par un univers fictionnel bien ficelé, pas la boule de peur du thriller ou du screamer bien placé. Non. C’était le genre de peur qui te prend quand un mec dans la rue te colle de trop près. Quand il ne comprend pas le « Non ». Quand il se met à t’insulter. La boule de peur réelle que toute femme de ma connaissance a déjà ressenti au moins une fois quelque part. L’insécurité.

 J’ai regardé le film jusqu’au bout quand même, pour voir ce que ça allait donner tout ça.

Ben rien. Ça donne rien. Et ça m’a foutu les boules.

De toutes les problématiques soulevées dans ce film, aucunes représailles pour ce geste-là. Le joint dans la voiture et l’arrivée des policiers oui. Mais la violence et l’intimidation non. Passées comme une lettre à la poste.

Parce qu’attention : c’est pas la représentation de la violence qui m’a révoltée. C’est le fait de représenter cette violence comme un fait social totalement accepté, et de ne pas la représenter comme dénonciation d’un problème de fond. Que ce geste (et les bousculades qui ne cessent de s’ensuivre dans le reste du film) passe inaperçu au milieu du reste. Une goutte de chiasse dans une fosse septique.

Sauf que pour moi, ce soir, ça a été la goutte qui a tout fait déborder et qui fait que je sorte ce texte à la va-vite a une heure du mat’ passée. Parce que je me suis pas penchée plus que ça sur le dit bémol de La vie d’Adèle, mais que la, ça implique, je trouve, d’autres choses. Une représentation de la femme-objet, ou de la femme intimidée, un peu trop omniprésente, et surtout, beaucoup trop banalisée.

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